Comme annoncé, Steve Sasson est donc venu. Il a vu Paris. Et il a conquis un public dans le cadre d’un événement co-organisé par Presans, Total et HEC.

Dans son introduction, Albert Meige, CEO et fondateur de Presans ainsi que Directeur académique du programme Transformation digitale à HEC, explique que son intérêt pour Steve Sasson trouve son origine dans sa passion pour la photographie. Quand il écrit Innovation Intelligence en 2015, le nom de Steve Sasson apparaît au crucial chapitre 3 du livre.

L’événement se déroule au Total Booster, un fab lab niché au cœur du quatrième groupe pétrolier au monde à la Défense. Il est frappant d’observer que pour devenir la major de l’énergie responsable, Total ait fait le choix de l’ouverture de son organisation : ouverture aux autres entreprises, aux écosystèmes, aux talents à la demande. Lieu dédié à l’exploration de nouveaux modes et rythmes de travail, le Total Booster est aussi ouvert aux remises en question fécondes — détail qui n’a rien de trivial au sein d’un groupe aussi prospère et formidable.

Valérie Laugier, Vice-présidente Digital & Innovation de la branche Marketing et Services, a donc encouragé Steve Sasson à ne pas prendre de gants lors de sa présentation.

Et si Total était le Kodak de l’énergie? Impensable?

Durant un siècle, Kodak occupa une position absolument dominante dans le domaine de la photographie. Le génie de Kodak fut d’abord d’avoir inventé la pellicule flexible, qui rendait possible les caméras faciles à transporter. Le second coup de génie fut de séparer la prise de photo du développement des images : vous appuyez sur le bouton, nous nous occupons du reste. Ces deux innovations technologiques permirent rien de moins que la démocratisation de la photographie. Elles abritèrent pendant longtemps un modèle économique extrêmement profitable, autour duquel se développa une culture d’entreprise où priorité fut donnée à l’excellence de la qualité des images, des nouveaux produits, des consommables et des processus de production.

C’est dans cette entreprise de rêve, en 1975, que Steve Sasson eut l’idée de la photographie numérique. Il en tira rapidement un prototype, puis un rapport technique et enfin un brevet.

Pendant longtemps c’est ce brevet qui allait fournir le seul indice public des activités de Kodak dans le domaine de la photographie numérique (il allait s’avérer hautement précieux par la suite). Steve Sasson poursuivit ses travaux de R&D sur la photographie numérique, mais ne rencontra pendant longtemps aucun intérêt au sein des divisions business. Ce n’est que vers la fin des années 1980 que le premier produit arriva : le poste émetteur-récepteur SV9600, qui permit notamment aux journalistes de CBS d’envoyer aux USA les images des événements en Chine pendant les troubles de 1989 (avant d’être confisqué).

L’histoire ne s’arrête évidemment pas là. Nous mettrons prochainement en ligne une vidéo de l’intervention de Steve Sasson, qui fut suivie par un échange stimulant avec le public. Les avis se partagent sur ce que Kodak aurait pu mieux faire, mais il y a un consensus autour de l’importance décisive du degré de compatibilité entre une innovation technologique donnée et le modèle économique et culturel d’une entreprise.

(De gauche à droite : Michael Offredi, Valérie Laugier, Steve Sasson, Albert Meige)

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Télécharger le chapitre 3 de Innovation Intelligence: Knowledge, the fuel of innovation — Steve Sasson, Alan Turing, ou encore Rudolf Diesel vous y donneront la clé de la gestion du risque dans un monde rythmé par les cycles d’innovation!

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